Deuil migratoire

Ce type de deuil est une réaction émotionnelle attendue face à un changement vital important qui va au-delà du simple changement de lieu de résidence physique, mas qui implique de nombreux autres changements auxquels on peut attribuer la qualité de pertes, car ils obligent à se détacher de ses habitudes pour pouvoir s’adapter à un nouvel environnement avec lequel on se sent déconnecté.

La migration peut représenter la recherche de meilleures opportunités en termes de mobilité professionnelle pour le développement économique, mais elle peut également résulter de déplacements massifs dus à la pauvreté, à la malnutrition, à la détérioration des conditions de santé publique, à la fuite de contextes de violence ou à la nécessité d’échapper à des situations de persécution ou de conflit.

La migration volontaire présente des caractéristiques d’ambiguïté émotionnelle qui compliquent sa reconnaissance par l’environnement et par ceux qui la subissent, car elle oscille entre le désir d’explorer, de découvrir de nouveaux horizons, la motivation professionnelle pour améliorer la qualité de vie et, d’autre part, la nostalgie de ce qui a été perdu, l’expérience du déracinement, la culpabilité d’avoir « abandonné », le besoin de s’ancrer, de construire une communauté et de reconstruire le sentiment d’appartenance dans un contexte nouveau et souvent hostile.

L’intensité, la durée et la récurrence dépendent de divers facteurs personnels, professionnels, économiques, climatiques, des conditions du déplacement, du niveau de préparation au changement, de la présence ou de l’absence de ressources psychosociales disponibles, de la distance culturelle entre le pays d’origine et le pays d’accueil.

Que sa motivation ait été forcée ou volontaire, le migrant est confronté à la perception d’un monde qui l’oblige à être vigilant face à toute éventualité afin de s’adapter aux nombreuses exigences qui lui sont imposées dans divers domaines :

-       Compréhension des normes nationales, régionales et provinciales.

-       Adaptation aux nouvelles saveurs et textures des aliments.

-       Complication liée à la différence de fuseaux horaires pour discuter avec la famille et les amis.

-       Nostalgie des paysages, des couleurs, des odeurs, de la luminosité et du climat de la ville d’origine.

-       Ne pas exercer la profession de la ville d’origine.

-       Apprécier différents styles de musique.

-       Soutenir le deuil systématique que vivent les proches en raison de son absence.

-       S’intégrer socialement avec des nouvelles habitudes et valeurs culturelles.

-       Modification ou perte symbolique ou réelle des groupes d’appartenance avec lesquels le migrant avait des liens affectifs.

-       Désuétude de la langue maternelle.

-       Expression de la religion.

-       Perte du statut social antérieur.

-       Compréhension de la différence culturelle dans l’expression des émotions.

-       Risques menaçant l’intégrité physique du migrant.

-       Redéfinition de l’identité.

-       Xénophobie (rejet, hostilité ou exclusion dans le pays d’accueil) due à des préjugés ou au racisme.

-       Difficulté à trouver un logement ou un emploi en raison de préjugés.

-       Construction de nouveaux réseaux de soutien.

-       Le défi de gérer des émotions désagréables telles que la culpabilité, la tristesse, la nostalgie, l’isolement, la confusion, la solitude, l’insécurité.

Il est possible qu’un deuil migratoire s’accompagne de multiples changements ou pertes concomitants tels que le divorce, le chômage, le décès d’êtres chers, la perte de la santé, entre autres. Plus les pertes s’accumulent et moins la capacité de réaction est grande ; en plus, la situation migratoire implique de multiples défis qui sont rendus invisibles, même par les politiques migratoires de chaque destination, mais qui compromettent le bien-être des migrants avec des implications psychologiques importantes telles que l’incertitude quant à l’avenir, avec des manifestations associées au stress chronique qui peuvent générer des troubles mentaux tels que l’anxiété ou la dépression dans leur empressement à s’adapter à la nouvelle réalité.

S’agissant d’une expérience multidimensionnelle, elle se présente de manière particulière chez chaque individu, c’est pourquoi il est toujours utile de disposer d’un espace psychothérapeutique spécialisé, de préférence dans le cadre d’une intervention précoce, afin de faciliter l’adaptation à son nouvel environnement grâce à la résilience et au renforcement face à l’adversité d’une reconstruction et d’une redéfinition de l’identité.

Il est important de mentionner que la promotion de la compréhension et de l’approche de ce phénomène est essentielle pour protéger la santé mentale des migrants et favoriser leur inclusion digne, empathique et soutenu dans les sociétés d’accueil.